21 Mai 2016
La serre de Bary a été construite dans les années 1880 pour cultiver le nénuphar géant ainsi que d’autres plantes aquatiques de la zone intertropicale. Elle faisait partie du complexe des grandes serres impériales qui ont été détruites à la fin des années 50, début des années 60. Il s’agit donc de la seule serre de cette époque dans la Neustadt et plus largement l’une des rares serres de ce type en Europe. L’unicité de ce bâtiment scientifique justifie à elle seule la sauvegarde de ce patrimoine.
Restaurer ce monument historique, c’est aussi poursuivre l’histoire scientifique alsacienne avec une dynamique moderne. Il s’agit de s’appuyer sur le riche passé naturaliste alsacien pour construire dans la continuité des connaissances nouvelles sur des bases solides.
Précisément, que peut apporter le développement d’aspects naturalistes dans un siècle où le numérique et la haute technologie dominent ? En effet, l’association de la botanique à la science actuelle peut surprendre tant cette discipline, tout comme la zoologie, nous renvoie à des images des cabinets naturalistes des 17 et 18e siècles. Pourtant, la connaissance du monde végétal est un enjeu sociétal et économique de première ampleur. Elle donne accès à des ressources pharmaceutiques nouvelles à l’heure où nos modèles classiques ne sont plus toujours en mesure d’apporter une réponse. Elle permet une agriculture respectueuse de la biodiversité à l’échelle mondiale. En effet, la botanique fournit des clés de compréhension des interactions entre les espèces pollinisatrices et les plantes et elle permet de tracer les flux des pollinisateurs et des pathogènes liés aux échanges internationaux. La botanique est donc au cœur de la compréhension de la modification des écosystèmes qui évoluent actuellement très rapidement sous l’action anthropique. Elle apporte des éléments permettant une gestion optimisée de ces écosystèmes.
Dans le monde scientifique actuel en plein mouvement, la rentabilité de nos actions nous impose d’aller toujours plus loin dans la spécialisation. Il n’y a plus guère de place pour l’interdisciplinarité qui permet d’étudier les organismes vivants dans leur contexte. Un Jardin botanique est le lieu où l’on se pose, où l’on observe, où les regards entre spécialistes peuvent se croiser, ce qui est propice à l’émergence de nouveaux concepts.
Pour ces différentes raisons, au-delà de l’aspect patrimonial indéniable de cet édifice, il paraît important pour l’intérêt de chacun d’entre nous d’engager les travaux de restauration de ce joyau architectural datant de la fin du 19e siècle.
François Labolle