Pour cette journée du Patrimoine, j'ai également visité La Chapelle de l'ancien Grand Séminaire de Meaux. C'est une chapelle Art Déco qui renferme une très belle bibliothèque ouverte au public. Dès le Ve siècle, le site abrite une église paroissiale dédiée à la Vierge puis accueille en 1135, sous l'épiscopat de Manasses II, une abbaye rattachée à l'ordre des chanoines réguliers de Saint-Victor qui reste en activité jusqu'à la Révolution. En 1807, Mgr Faudoas installe le Petit Séminaire dans une partie de ses bâtiments avant que les religieuses de la Visitation ne succèdent aux séminaristes, jusqu'en 1903. En 1907, le Grand Séminaire y est transféré à la suite de la loi de séparation des Églises et de l'État, jusqu'à sa fermeture définitive en 1960. En 1936, l'évêque Mgr Lamy confiait à l'architecte meldois le soin de bâtir un bâtiment destiné à abriter une chapelle et des chambres de séminaristes. La chapelle de cinq travées identiques séparées par sept arcs transversaux est fermée à l'ouest par une travée plus petite qui sert d'entrée. La structure en béton armé des arcs est masquée par un couvrement de briques appareillées, à l'exception des clefs des arcs brisés. Ce couvrement, inspiré des créations de l'architecte bénédictin Dom Bellot, est mis en valeur par des motifs en ressaut, l'alternance de briques rouges et jaunes accentuant l'effet de relief. Le plafond est soutenu par des poutres parallèles à l'axe de la chapelle. Elles assurent la continuité visuelle de la nef segmentée par les arcs transversaux des travées, qui produisent un effet de progression vers le chœur. Le mobilier liturgique, toujours en place, est d'inspiration Art déco tout comme le décor intérieur.
Louis Barillet (1880-1948), Jacques Le Chevallier et Théodore Hanssen sont membres des Artisans de l'Autel, groupe fondé en 1919, orienté vers l'artisanat érigé en grand art, ce qui peut expliquer l'absence de signature de nombreux vitraux réalisés par l'atelier, la création collective primant sur les individualités. Ces vitraux marquent l'un des points culminants de l'activité du trio avant sa dissolution dans les années 1940. Huit vitraux correspondent à un programme iconographique centré sur la spiritualité française et deux consacrés à la musique. Chaque vitrail comprend cinq lancettes. Une scène figurative occupe la lancette centrale en verre soufflé, technique qui permet l'utilisation d'une grande palette de couleurs. Une couronne stylisée orne le vitrail de saint Jean. Au bas du registre figuratif, des fleurs de lis accompagnent le monogramme du sujet, le tout en grisaille. Les quatre autres lancettes en verres imprimés alternent compositions abstraites et médaillons symboliques. Ces derniers, réalisés en grisaille suivie d'enlevés à la pointe sèche et rehaussés de jaune d'argent, sont fichés dans des carrés sur la pointe. Ils sont probablement de la main de Hanssen. Des citations des textes sacrés accompagnent les symboles. Ces verres imprimés ou verres américains ont pu être fabriqués par Saint-Gobain, qui a généralisé la technique en France dans les années 1930. Économique, elle permet des motifs colorés et des textures variées offrant de nouvelles possibilités artistiques.
Georges Desvallières (Paris, 1861-1950) est élève de Jules Valadon et Élie Delaunay, qui le présente à Gustave Moreau, à l'académie Julian. En Italie, il est séduit par la nature et par l'esprit de la Renaissance avant d'hésiter entre naturalisme et symbolisme. En 1883, il est reçu au Salon. Dès 1888, il revient à l'antique et exécute d'innombrables croquis, se renouvelant sans cesse dans sa recherche de la beauté spirituelle puis se tourne vers l'art religieux. Sa fougue de converti confère une dimension expressionniste à sa peinture. Ses Christ douloureux lui valent le surnom de Michel-Ange des Macchabées. Son œuvre religieuse est marquée par la mort de son fils, qui sert sous ses ordres pendant la Première Guerre mondiale. Cette peinture est réalisée sur une toile marouflée sur le mur du fond, sur l'arcade encadrant l'autel, et sur une seconde arcade ouvrant sur la nef. Le Christ en croix est représenté au fond entre le Sacrifice d'Abraham, du côté de l'Épître, et la Présentation au Temple du côté de l'Évangile. Au sommet de la première arcade sont peints les trois clous de la Crucifixion, un roseau avec l'éponge imbibée et une lance épiscopale. Une assemblée d'évêques, parmi lesquels le pape Pie XI est identifiable à ses lunettes, figure de part et d'autre, à la hauteur des fidèles. Le sommet de la seconde arcade est décoré par une image de Dieu le Père. Plus bas sont peintes des têtes d'angelots. La Lapidation de saint Étienne, du côté de l'Évangile, et le retour de l'Enfant Prodigue, du côté de l'épître, occupent les murs.
En 1976 la bibliothèque diocésaine est installée, placée sous le patronage de Guillaume Briçonnet (évêque de Meaux de 1516 à 1534). Elle fut constituée au début du XIX° siècle par quelques milliers de livres anciens provenant des saisies révolutionnaires. Elle s'enrichit ensuite de notes manuscrites et de livres légués par des prêtres érudits.